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Assurance-emprunteur dans le cadre d’un crédit immobilier / appréciation du caractère abusif de certaines clauses relatives à la garantie incapacité totale de travail

Cass. Civ I : 14.4.16 / Cass. Civ II : 14.4.16 et 24.3.16
N° de pourvoi : 15-19107,15-16273 et 15-15041

La question de l’application de l’article L.132-1 du Code de la consommation en matière de clauses abusives au contrat d’assurance-emprunteur n’est plus discutée depuis longtemps. Il lui est applicable comme à tout autre contrat.

Dans trois arrêts récents, la Cour de cassation a eu à se prononcer sur le caractère abusif ou non de clauses relatives à la garantie Incapacité totale de travail (ITT) figurant dans des contrats d’assurance-emprunteur.

Dans un premier arrêt du 14 avril 2016 (pourvoi n°15-19107), la Cour de cassation confirme la solution du juge du fond qui avait retenu qu’une clause d’un contrat d’assurance de groupe était abusive. En l’espèce, un paragraphe de la notice (14.4) définissait l’état d’ITT par l’impossibilité absolue, pour un assuré ayant une activité professionnelle au jour du sinistre, d’exercer une activité professionnelle à temps complet ou à temps partiel, sans autre précision. Un autre paragraphe de la notice (1) relatif aux garanties offertes par le contrat ne contredisait pas l’acception commune selon laquelle l’incapacité temporaire de travail correspondait à une incapacité médicalement reconnue mettant l’assuré dans l’impossibilité complète et continue, à la suite de maladie ou d’accident, de se livrer à son activité professionnelle lui procurant gain et profit. Cette interprétation de l’ITT étant en outre confirmée par l’exigence de la production d’une attestation médicale d’incapacité ainsi qu’une attestation d’arrêts de travail. Il a été jugé que le paragraphe 14.4 de la notice n’était donc pas clair et devait en conséquence être supprimé de la notice.

Dans deux autres espèces (pourvoi n°15-16273 et 15-15.041), les clauses prétendument litigieuses ont été validées par la Cour de cassation. Sans équivoque, ces clauses n’ont pas à être interprétées.

On sait que, dans le cadre de la garantie ITT, les contrats d’assurance font référence, pour la mise en jeu de la garantie, soit à l’incapacité pour l’emprunteur d’exercer strictement sa profession au moment du sinistre ou à l’incapacité d’exercer toute activité pouvant lui procurer des revenus (à la suite d’une maladie ou d’un accident). Cette précision figure d’ailleurs dans la fiche standardisée d’information qui doit être remise au candidat à l’emprunt depuis le 1er octobre 2015 (cf. Habitat Actualité n°144). Dans une décision datée du 14 avril 2016 (pourvoi n°15-16273), il est retenu que la clause qui prévoit que « l’assuré est en état d’ITT lorsque, à l’expiration d’une période d’interruption continue d’activité de 90 jours (dite délai de carence), il se trouve, à la suite d’une maladie ou d’un accident, dans l’obligation d’interrompre totalement toute activité professionnelle (ou, s’il n’exerce pas ou n’exerce plus d’activité professionnelle, d’observer un repos complet le contraignant à interrompre ses activités habituelles) est une clause claire et précise ». Pour l’assuré, l’emploi du verbe « interrompre » impliquait une rupture dans la continuité du travail et donc une interruption de son activité au moment du sinistre et non de toute activité quelconque. La Cour de cassation approuve le juge d’appel : la clause est claire et non équivoque et n’a pas à être interprétée.

Dans un arrêt du 24 mars 2016 (pourvoi n°15 15041), la clause soumise à l’examen des juges prévoyait que « la garantie incapacité du travail » n’était accordée qu’aux personnes physiques exerçant une activité leur procurant un revenu au moment du sinistre. Aux yeux de l’assuré, rien ne lui indiquait que la perte d’emploi postérieure à la conclusion des contrats le priverait de son droit à garantie. Dès lors que la clause figure dans un paragraphe relatif à la mise en jeu des garanties, la cour d’appel puis la Cour de cassation refusent cette interprétation. C’est bien à la date du sinistre que l’exercice d’une activité doit être apprécié. La clause est claire et précise et n’a donc pas à être interprétée.

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